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Daniel Stefanetti, Gérant de Ethenea Independent Investors

le 19/12/2016 12:28:00

Selon Bank of America-Merrill Lynch les fonds obligataires ont enregistré des sorties nettes proches de 30 milliards de dollars sur les cinq dernières semaines, du jamais vu depuis mi-2013. Peut-on parler de krach obligataire ?

Oui on peut parler de krach obligataire. La remontée des taux au cours des 5 dernières semaines est la plus rapide que l'on ait observée depuis près de 40 ans et elle n'avait pas été anticipée par les investisseurs. Le marché était assez sceptique sur la possibilité d'un accord à l'Opep, or cet accord a bien eu lieu. De même avec l'élection de Trump. Même si je ne pense pas qu'il pourra appliquer l'intégralité de son programme de baisses d'impôts et d'augmentation des dépenses publiques, il aura un impact non négligeable sur l'économie américaine. Dernier élément, la croissance américaine a été beaucoup plus forte que prévu au troisième trimestre (+3,6% contre 2,5% attendus). Tout cela a provoqué un ajustement brutal des anticipations de croissance et d'inflation, avec comme conséquence une remontée des taux longs aux Etats-Unis et dans une moindre mesure en Europe, et une baisse du marché obligataire.



Quels sont les segments de marché les plus affectés par ces sorties de capitaux ?

Les obligations des pays émergents ont subi de plein fouet la baisse, accentuée par un repli des devises locales : les investisseurs rapatrient leurs fonds aux Etats-Unis en investissant dans d'autres classes d'actifs comme les actions qui ont atteint des plus hauts historiques. Mais les obligations d'Etats européens et les titres de très bonne qualité ont également souffert. En effet, avec un coupon proche de zéro, voire négatif, ces titres sont très exposés à la remontée des taux qui engendre des pertes sèches en capital. Le compartiment "high yield" (obligations à haut rendement, ndlr) a nettement mieux résisté jusqu'à présent.
Le fonds Ethna-Defensiv dont j'assume l'orientation stratégique est aujourd'hui principalement investi dans des obligations d'entreprises américaines notées aux alentours de A-/BBB+. Ce sont des entreprises avec des cash flows positifs et solides, une croissance de leur chiffre d'affaires et de leurs résultats ainsi qu'un endettement raisonnable. Le rendement brut sur ce type de dette frôle en moyenne les 4%. Cela nous laisse une marge confortable, même en cas de remontée des taux de Fed Funds (10 ans) aux alentours de 2,75%-3%, ce qui pourrait se produire d'ici 12 mois dans un scénario négatif.

La BCE a annoncé qu'elle prolongeait son programme de rachat d'actifs (QE) jusqu'en décembre 2017, mais en réduisant les montants injectés à compter d'avril. Comment interprétez-vous cette annonce ?

Je m'attendais que la BCE prolonge son QE jusqu'à fin 2017 avec le même montant (80 milliards par mois). Une autre option eût été de réduire les volumes en modifiant la clé de répartition des achats, autrement dit acheter un peu moins de Bund et un peu plus de dette des pays périphériques (Italie, Espagne Portugal). Cela aurait permis de rassurer les investisseurs sur l'Italie et en particulier sur le secteur bancaire italien. Mais les règles de la BCE ne lui permettent pas d'avantager tel ou tel pays. Au final l'annonce de Draghi ressemble à une sorte de " tapering-soft ", d'ailleurs les marchés ne s'y sont pas trompés avec une nette remontée des taux de rendement des emprunts étatiques de l'Europe du Sud.

Faut-il s'attendre à de nouvelles turbulences sur les marchés de la dette en Europe ?

La BCE refuse pour le moment de parler de tapering mais elle pourrait commencer à l'évoquer dans quelques mois, si les perspectives d'inflation s'améliorent. Or il y a des raisons objectives à un retour de l'inflation en Europe (hausse du prix du pétrole, politiques de relance à l'oeuvre dans plusieurs pays, effet 'Trump', etc). C'est pourquoi j'évite d'investir sur les obligations européennes aujourd'hui. Acheter du Bund me paraît extrêmement dangereux car il suffit d'une remontée plus rapide que prévue des taux pour perdre de l'argent.

Les actions européennes sont-elles plus attractives ?

Le marché actions européens est attractif. Les valorisations sont raisonnables et les perspectives de croissance des bénéfices supérieures à celles des entreprises américaines. Je pense que le premier semestre 2017 pourrait permettre un rattrapage des actions européennes. A ceci près que les investisseurs anglo-saxons se méfient de l'Europe après le vote du Brexit et l'échec de la réforme constitutionnelle en Italie. Les scrutins à venir en France et en Allemagne suscitent également beaucoup d'incertitudes. Par ailleurs, si la BCE commence à évoquer un tapering, cela risque de freiner la hausse des actions européennes.

2016-12-13 13:09:17 - Copyright © 2006 http://www.easybourse.com

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