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Benjamin Smith, DG de Air France-KLM

14/01/2021 14:52:00
Air France-KLM : plus que tout autre compagnie, très dépendante du tourisme et de l'événementiel (un handicap aujourd'hui, une force demain ?)

Air France-KLM est en vol stationnaire depuis le 21 novembre, malgré l'annulation prévisible (mais non certaine à l'époque) des voyages durant les fêtes.

Les couvre-feu, confinements et autres quarantaines n'ont pas replongé le titre dans une phase de déprime boursière comparable au début de l'automne, quand les premières rumeurs de résurgence épidémique automnal ont commencé à circuler.

La plupart des compagnies régulières européennes affichent un profil boursier comparable, ainsi que les spécialistes du " low cost " comme Easy Jet, ou Ryanair qui affichaient également une chute respective de -80% et -78% de leur chiffre d'affaires fin 2020 (par rapport à la période correspondante de 2019) et deux tiers sur l'ensemble de l'année.

Le " low cost " se montre plus réactif en cas de reprise du trafic : les 2 compagnies avaient vu bondir de +50% les réservations pour Noël lors de la divulgation de résultats très encourageants pour le vaccin Pfizer/Biontech, suivi par un déconfinement de Londres début décembre, un espoir de reprise temporaire du trafic ruinée par l'apparition d'une nouvelle " souche britannique " juste avant les congés de fin d'année.

Sans parler des 175.000 de français résidant outre-Manche souhaitant rentrer en France pour passer les fêtes en famille, le déconfinement de Londres était également une bonne nouvelle pour Air France-KLM, c'est une destination très prisée alors que les soldes débutent juste après Noël au Royaume Uni : tous les vols avaient dû être annulés lors du blocus des 21/22 décembre.

C'est finalement Dubaï qui enregistrera un pic inédit de réservations de dernières minutes juste avant les fêtes... pour le plus grand bonheur des compagnies émiraties.

Mais dès le 4 janvier, les amateurs de voyage français ont vite compris qu'ils n'allaient plus trouver de destinations valent le coup de prendre un billet d'avion avant fin mars car les mesures de restrictions sanitaires ont commencé à se renforcer partout en Europe, comme en Amérique du Nord.

Le France a perdu de son côté tout attrait touristique depuis fin octobre, plus aucun salon international ne se déroule en " présentiel " dans aucune métropole française desservie par un aéroport depuis mars dernier : cela constituait une part très significative des ventes de billets et aucun retour à la normale ne se profile avant le début du second semestre 2021.

Le prolongement de l'état d'urgence jusqu'au 30 juin (acquis) et probablement 31 décembre 2021 envoie un mauvais signal : il induit que l'exécutif compte rester en capacité de pouvoir appliquer des mesures restrictives, notamment en ce qui concerne les événements impliquant un grand nombre de participants (salons thématiques, conventions internationales, festivals, fashion week, rencontres sportives, etc.) en dépit d'une campagne de vaccination qui devrait atteindre son apogée en juillet prochain.

Les organisateurs de ces événements -particulièrement nombreux sur la période mai-juin-juillet devront tenir compte d'un risque élevé d'annulation pour raisons sanitaires.

Le scénario d'un printemps 2020 " bis " semble difficile à écarter : des reports purs et simples à l'année 2022 pourraient être décidés avant fin janvier, entrainant de nombreuses annulations de vols aller/retour vers la France.

Il reste la possibilité de sauver la saison estivale avec les déplacements touristiques, une saison creuse pour les voyages d'affaire.

Tout ce qui précède est destiné à prendre la mesure des défis que devra relever AirFrance-KLM en 2021... mais également de ce que les marchés ont déjà digéré.

Et il semblerait que les cours intègrent un scénario plutôt sombre, la compagnie prévoit une offre de sièges inférieure de plus de 40% cette année par rapport à 2019 : il en découlerait une nouvelle perte d'exploitation de 2Mds en 2021, après une perte de -3,6MdsE en 2020.

Des estimations et des pertes cumulées qui donnent le tournis mais que les investisseurs accueillent avec un indéniable sang-froid.

En avril dernier, l'état avait mis sur pied un plan de sauvetage de 7MdsE (4MdsE de prêts bancaires garantis à 90% par l'état, + 3MdsE via un prêt d'actionnaire).

Les Pays-Bas avaient de leur côté injecté 3,4MdsE d'aides dans KLM, soit au total 10,3MdsE pour maintenir Air France-KLM à flot... et permettre à la compagnie d'honorer ses commandes d'Airbus-A350 auprès de l'avionneur européen (alors que l'exploitation de l'A380 a été abandonnée), mais aussi de Boeing car KLM a fait le choix des " Dreamliners " (et conserve sa flotte de gros porteurs B-777).

Les investisseurs restent animés par la forte conviction que le gouvernement pourrait accélérer la recapitalisation du groupe, évoquée depuis l'automne dernier, afin d'éviter plus de réductions d'effectifs que les 7.600 déjà prévus d'ici fin 2022, soit 16% des effectifs (la filiale " Hop !" étant décimée), les syndicats redoutant que le total se rapproche de 25%, ce qui est plus ou moins la norme pour les compagnies US, American Airlines ayant licencié 30% de ses 140.000 salariés (départs actés en octobre dernier).

Jean-Baptiste Djebbari, le ministre délégué chargé des Transport a évoqué la volonté de l'état de "restaurer la capacité de la compagnie à faire face à l'après-crise".

L'État, qui possède déjà 14% du capital d'Air France-KLM, pourrait doubler sa part dans la compagnie : cela représenterait une mise de fond de 4 à 5 MdsE, un peu sur le modèle de la montée au capital de Peugeot via une augmentation de capital de 3MdsE (souscrite à part égale par l'Etat et Dongfeng, soit 1,5MdsE) fin janvier 2014 et qui s'était soldée par une belle plus-value.

Mais cela implique au préalable de trouver un accord avec l'État néerlandais, lequel a consenti un effort comparable à la France par rapport au budget des Pays Bas, ce qui signifie que les 2 parties ont un intérêt évident à trouver un terrain d'entente.

Mais des dissensions pourraient émailler les négociations et rendre le titre volatile, c'est le côté négatif.

Côté positif, il n'est pas exclu que le virus reperde du terrain rapidement après un cycle d'un an (et cela fera 18 mois en avril), ce qui est un comportement relativement classique avec les " corona " lorsque se produit un phénomène d'immunité collective.

Cela ne signifierait pas la disparition immédiate des tests avant l'embarquement, des masques en cabine mais au moins, de nombreuses destinations pourraient rouvrir et permettre à des millions de français d'aller retrouver des proches installés à l'étranger, de changer d'ambiance, de se rendre aux JO de Tokyo...
 

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